Aujourd’hui, le continent connaît une période très intense de mutations sociales, politiques et économiques, ainsi que de nouveaux défis dont la lutte contre le terrorisme. L’Afrique est la région du monde qui affiche la plus forte croissance et est sur le point d’amorcer une transformation économique profonde et nécessaire. Pour cela, le continent doit rompre avec le passé : les aides financières internationales ne suffisent plus et ne parviendront jamais à générer un terreau fertile à un développement économique durable. L’Afrique doit maintenant se faire confiance et admettre que son développement doit dépendre en priorité de ses propres ressources internes.
Pour cela, il est tout d’abord indispensable de développer les infrastructures. Afin de parvenir à générer une activité économique efficace, le continent a besoin d’une électrification homogène et fiable, de routes en bon état, d’équipements et de services publics qui fonctionnent, etc. Selon la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), le développement des infrastructures africaines pourrait entraîner une hausse de 2% du PIB, posant ainsi les bases d’une industrialisation indispensable, créatrice de richesses et d’emplois. Cependant, l’équipement du continent en infrastructures a un coût colossal : 93 milliards de dollars par an, quand l’Afrique ne peut en consacrer que 45 milliards. Il faut donc trouver comment financer les 48 milliards de dollars restants.
Ainsi, le plus grand défi de l’Afrique consiste à trouver des sources de financement appropriées et innovantes ainsi que des niches d’économies potentielles afin de venir appuyer sa transformation. Or les modèles de gouvernance, de financement et d’investissement actuels ne permettent pas cela. Je reste par exemple persuadé que d’immenses économies sont mobilisables grâce à l’intégration régionale. Cela permettra entre autres de simplifier le commerce intra africain mais aussi par exemple de mettre en place des lois communes visant à lutter contre les flux financiers illicites (phénomène qui a fait perdre à l’Afrique environ 854 milliards de dollars US entre 1970 et 2008).
D’autres leviers méritent également d’être actionnés : selon la BAD, l’Afrique est le marché proposant le plus fort potentiel d’investissement au monde. Ainsi, en encourageant une épargne intérieure encore très faible, le continent africain pourrait attirer des fonds souverains, des fonds de pension, ainsi que des investissements directs étrangers, séduits par un environnement enfin porteur. Egalement, des programmes simples mais coordonnés de prélèvement d’impôts et d’incitations pourraient permettre que des capitaux soient investis dans de grands projets d’infrastructures. Enfin, le sujet des transferts de fonds est aussi très important : l’argent versé par les ressortissants africains établis hors du continent peut représenter parfois jusqu’à 10% du PIB de certains pays. Mais le coût de ces transferts reste trop élevé : les réduire aurait sans aucun doute un effet favorable sur les flux générés.
Il est donc évident que l’Afrique a les moyens de financer son développement, mais cela n’arrivera que si et seulement si des réformes courageuses sont décidées : l’exigence d’une bonne gouvernance, des institutions efficaces et réactives, une participation accrue du secteur privé dans le développement d’infrastructures, etc. Ce sont des conditions indispensables au fait que nous, Africains, puissions nous approprier notre développement et commencions à nous faire confiance. Le potentiel en ressources sur le continent existe bel et bien et des résultats très concrets sont à portée de main.
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